A la demande du Ministre Van Quickenborne et de l’IBPT, les consultants Analysis Mason et Hogan & Hartson ont remis un rapport édifiant, mais sans surprise, sur la situation du haut débit en Belgique. Oui, la Belgique reste chère.  Oui, il existe un duopole.  Le rapport préconise des actions à entreprendre pour débloquer la situation : casser, réguler, reconstruire.    Maintenant que le rapport est public, prière d’agir !

Nous avons épinglé quelques extraits de ce rapport, que nous avons lu et étudié avec attention. Ce dernier déploie des arguments connus de tous – ce qu’il reconnaît implicitement ! -, souvent pointés du doigt par des organismes de défense du consommateur, comme Test Achats.

La conclusion est évidente : il faut une impulsion politique musclée et un organisme de régulation aussi puissant qu’indépendant. Sans cadre régulatoire fort, sans une pression sur les offres bitstream (Belgacom), le « multiple play » ne pourra être étendu à d’autres opérateurs que le duopole Belgacom / câble.

On notera avec amusement que le seul « bravo » accordé par le rapport, en dehors de la reconnaissance d’une amélioration des débits et des offres depuis 2007 chez les 2 principaux opérateurs, est pour Numéricâble (ex-Coditel), qui opère dans un grand nombre de communes bruxelloises, avec des offres triple play à partir de 39,95 euros : téléphone national illimité / Internet 30 mégas  (100 dans certaines zones limitées) / télévision (HD compris) numérique.

Extraits du rapport

  1. Notre évaluation du marché du haut débit en Belgique montre que la croissance du marché ralentit et que l’intensité de la concurrence, la dynamique du marché et les niveaux de prix ne sont pas satisfaisants.
  2. Le dernier rapport de la Commission européenne montre que la Belgique est classée huitième en termes de pénétration large bande à partir du S1 2008. La croissance du haut débit en Belgique est désormais plus lente que dans beaucoup de pays européens, bien que ce recul relatif doive être mis en perspective: le taux de pénétration actuel du haut débit en Belgique est par exemple similaire à celui de la France.
  3. Belgacom est l’opérateur historique avec 99,8% de couverture DSL en janvier 2008. A la fin de 2008, Belgacom a acheté Scarlet, le principal opérateur DSL de Belgique (Scarlet était le premier opérateur alternatif DSL avec une part de marché de 4% des lignes à haut débit au S1 2008). Les câblodistributeurs sont les principaux concurrents de Belgacom sur le marché du haut débit. Ils sont uniquement actifs dans des zones de couverture spécifiques et n’ont pas de déploiement national. Il y a toujours des zones en Wallonie où les réseaux câblés peuvent uniquement fournir des services TV mais ne peuvent pas fournir de services haut débit. Les opérateurs alternatifs DSL comprennent plusieurs ISP (KPN/Tele2, Mobistar, Colt, Euphony, etc.) achetant des services DSL de gros à Belgacom.
  4. Les parts de marché stables des principaux opérateurs Belgacom et Telenet sont un indicateur de l’environnement concurrentiel difficile auquel les opérateurs alternatifs sont confrontés.
  5. Le marché est caractérisé par un comportement relativement similaire de Belgacom et Telenet, Telenet proposant des offres haut débit légèrement plus attrayantes (débit supérieur, limite de téléchargement mensuelle plus élevée) pour un prix similaire aux offres de Belgacom.
  6. Le prix des offres large bande haut de gamme de Belgacom et Telenet (environ EUR60) est significativement plus élevé que les prix vus dans les pays voisins (environ EUR30 en France, et en dessous de EUR50 aux Pays-Bas et au RU).
  7. Les opérateurs alternatifs DSL ne sont pas capables d’être concurrentiels sur le marché des offres multiple play. Théoriquement, le dégroupage de la boucle locale permet aux opérateurs alternatifs DSL de fournir des services IPTV, et donc des offres multiple play. Cependant, l’utilisation du LLU est en fait limitée aux zones les plus denses. Les offres bitstream existantes n’autorisent pas un opérateur alternatif DSL à fournir des services télévisuels (en raison de la structure technique et de prix des offres bitstream de Belgacom 7). Conséquence : les alternatifs DSL ayant des stratégies commerciales nationales ne peuvent pas proposer des offres multiple play.
  8. Du point de vue du marketing, ces dernières années ont vu un nombre croissant d’offres multiple play proposées par les câblodistributeurs et par Belgacom. Les offres triple play de Belgacom sont généralement comparables à celles de Telenet et des autres concurrents. Pour le moment c’est Numéricable qui propose les offres les plus agressives.
  9. L’environnement régulatoire et légal est tel que les décisions de l’IBPT font systématiquement l’objet d’un recours par Belgacom ou d’autres opérateurs PSM, créant des incertitudes pour le marché et détournant les ressources de l’IBPT de ses priorités essentielles.
  10. Recommandations. L’implémentation de programmes de subvention d’ordinateurs personnels. L’adoption d’une position plus modérée en matière d’interdiction d’offres commerciales groupées, afin de permettre la vente groupée de PC et de connexions haut débit. La commande d’une étude pour estimer l’impact et le coût d’une mesure visant à subventionner une connexion haut débit/PC pour les classes sociales défavorisées.
  11. Encourager l’entrée sur le marché de nouveaux acteurs / renforcer les opérateurs
    alternatifs existants afin d’augmenter la concurrence et faire baisser les prix.
  12. Point précis : Encourager la consolidation des réseaux câblés en Wallonie.La consolidation du câble est en cours en Wallonie. Brutele, Tecteo et NewCo commercialisent désormais leur produits sous la marque Voo. Toutefois, il semble que des problèmes au niveau gouvernemental se posent encore au sein de l’entité Voo. Il faudrait s’assurer que tout est fait, par exemple au niveau politique, pour faciliter et encourager la consolidation du câble.
  13. Vu l’importance actuelle des offres bitstream de gros pour le développement de la concurrence sur le marché du haut débit, il est important de veiller à ce que les offres bitstream soient enrichies par une gamme étendue d’options techniques et de qualité de services pour les opérateurs alternatifs DSL, afin qu’ils puissent faire preuve d’innovation et soient à même de différencier leurs offres haut débit de détail de celles de Belgacom. Imposer la fourniture d’une offre de gros, disponible sur une base nationale, permettant la diffusion de services TV.
  14. L’IBPT devrait étudier la pertinence d’imposer une obligation de non-discrimination plus stricte à Belgacom. Dans le cadre d’une telle obligation, l’opérateur historique serait prié d’appliquer le même traitement entre sa propre industrie en amont et les tierces parties indépendantes, autorisant les opérateurs alternatifs DSL à acheter des offres bitstream de gros de Belgacom pour fournir la même offre de détail à l’utilisateur final que Belgacom.

Le rapport peut être consulté sur le site de l’IBPT.